En voyant “dans l’Église catholique et ses rites le pouls de notre civilisation“, Michel Onfray (écrivain et philosophe connu pour un athéisme clairement professé) dit être consterné par la décision du Pape François qui restreint drastiquement l’exercice du rite tridentin.

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Depuis le 17 juillet les médias se font l’écho des très nombreuses réactions au Motu ProprioTraditionis custodes” (16-07-2021), acte législatif (Droit Canonique) du Vatican qui restreint drastiquement la pratique du rite tridentin au sein de l’Église Romaine (cf. Summarum Pontificium de Benoît XVI, pour la forme extraordinaire du rite romain). Ces réactions sont essentiellement basées sur la dureté du ton adopté (qui contraste avec celui des autres messages du Pape François), la précipitation dans la promulgation du document (Lire le point 3 de la déclaration  du cardinal Burke), la consternation devant les accusations formulées. En voyant “dans l’Église catholique et ses rites le pouls de notre civilisation“, Michel Onfray (écrivain et philosophe connu pour un athéisme clairement professé) se positionne sur un plan d’analyse différent. Il le fait dans une Tribune du Figaro (18-07-2021), où sous le titre “La messe en latin un patrimoine religieux“, il met en cause la lettre apostolique du Saint Père en manifestant sa consternation devant la décision du Pape François.

Auparavant, à plusieurs reprises, Michel Onfray avait déjà exprimé son inquiétude devant l’effondrement de notre héritage chrétien. Plus particulièrement, à propos de son nouvel essai, L’Art d’être français (Éditions Bouquins, mai 2021), dans le “Grand Entretien” (17 juin 2021) du Figaro Vox, il confirmait son engagement dans la défense du patrimoine spirituel européen en disant : «Je regrette le déclin de la civilisation judéo-chrétienne, je me bats pour elle». Ce déclin avait été d’ailleurs l’objet de son essai “Décadence: Vie et mort du judéo-christianisme” (Flammarion 2017), où il reprochait au concile Vatican II (1962-1965) d’avoir fait disparaître  “la transcendance et le sacré pour confiner le catholicisme dans l’immanence d’un moralisme politiquement correct [A ce sujet lire l’article, publié dans La Revue des deux Mondes Le Pape, le politiquement correct et le reste” de l’écrivain algérien, Boualem Sansal menacé de mort par les islamistes].  Notamment, le texte de Michel Onfray identifiait là l’une des voies de la «déchristianisation» de l’Occident, due en partie à la perte de la richesse symbolique de la liturgie. Perte par effacement d’une transcendance manifestée individuellement via une contemplation engendrée par la beauté du rite et le sens qui en émane.

Cette transcendance est celle qui, en particulier, transparait à travers la magnifique image de la sérénité du père Francisco Vera, exécuté pour célébration de la messe interdite au Mexique (1927).

Momentanément interrompue par l’arrivée des soldats, la messe poursuit son cours sacrificatoire devant les bourreaux. L’Hostie (du latin Ostia: la Victime du Sacrifice) est devenue le prêtre face à la haine du Monde (au sens johannique) symbolisé par les fusils des soldats, et l’officier qui va commander l’ouverture du feu. En habits liturgiques, mains jointes, le prêtre prie: il agit in persona Christi. Cette prière ne peut être que celle de l’Offertoire du missel romain de l’époque : offrande de la personne même du prêtre dans toute sa plénitude, ceci dans la perspective du renouvellement du sacrifice du Christ. Dans la forme, offrande distincte de celle du “pain  fruit de la terre, du vin fruit de la vigne, et du travail des hommes“, dans la perspective mémorielle de la Sainte Cène du Jeudi Saint (forme ordinaire du rite romain).

Le texte de Michel Onfray se termine par cette phrase : “Ajoutons d’une façon tout aussi énigmatique – mais pas tant que ça – qu’on se demande pourquoi nous vivons dans une époque avec deux papes“. Faut-il voir ici une allusion au Mystère d’Iniquité (2 Thessaloniciens 2:1-10)??? C’est la thèse (24 -07-2011, donc avant la renonciation du pape : 28-02-2013 ) d’un auteur anonyme qui commentait « Priez pour moi, afin que je ne me dérobe pas, par peur, devant les loups », prononcé par Benoît XVI lors de la messe inaugurale (24-04- 2005) de son pontificat. Paroles uniques dans l’histoire de l’Église, qu’aucun de ses prédécesseurs n’a adressé aux fidèles. Indépendamment, Bibb un auteur (ex-musulman converti au catholicisme) du site Notre-Dame de Kabylie, a publié (21-07-2021) un texte dans le même sens.

Revenant à l’inquiétude de Michel Onfray sur le futur de la civilisation européenne: elle n’est pas vaine. Ainsi, en 2011, sur le critère de la pratique religieuse, l’article Islam Overtaking Catholicism in France du Gatestone Institute (basé sur un sondage de l’IFOP de 2011) dit que l’islam était déjà la première religion en France: 1.9 million de catholiques pratiquants vs 2.5 millions de musulmans pratiquants. Un autre chiffre (basé sur les méthodes scientifiques de la statistique prévisionnelle) fait apparaitre les “fruits du rite tridentin. Bien qu’en France les fidèles “traditionnels” soient en nombre très minoritaires, vers 2038 le nombre de prêtres “traditionnels” dépassera celui des prêtres de la réforme liturgique (by the year 2038, traditional priests will outnumber priests celebrating the new mass).

Il est vraisemblable que la place, ici donnée à la réaction particulièrement antagonique de Michel Onfray, sera jugée sévèrement par certains lecteurs de Notre-Dame de Kabylie. Toutefois, il faut préciser qu’un Motu Proprio est un acte législatif, c’est à dire de gouvernement, donc révocable, comme ceci vient d’être fait par le Pape François pour Summorum Pontificium. Un tel acte exprime la volonté papale qui, en Droit Canonique, n’est pas infaillible à moins que le Pontife, en le promulguant, n’entende définir des points de doctrine, ou de morale, contraignants pour chaque catholique. De toute façon, sur ce sujet, le point de vue d’un écrivain athée, reconnu pour son talent et l’étendue d’une culture qui touche la plupart des domaines de la connaissance, ne peut être qu’enrichissant même pour les lecteurs ne partageant pas ses convictions.

Indépendamment du commentaire ci-dessus, en passant, nous notons qu’une pétition adressée à Madame Audrey Azoulay, directrice générale de l’UNESCO, demande l’inscription de la messe tridentine au patrimoine mondial de l’Humanité. Elle a a été lancée le 20 juillet 2021 par SOS Patrimoine.

L’article de Michel Onfray est reproduit ci-dessous en format Pdf, avec certaines parties (jugées importantes) en caractères gras italiques

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