I have e dream : une rencontre islamo-chrétienne à Ryad

 

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Le grand mufti d’Arabie Saoudite a dit :

« Il est nécessaire de détruire toutes les églises de la région [arabique] »… mais cela n’émeut personne, puisqu’au même moment on s’est congratulé et on s’est rassuré sur le dialogue islamo-chrétien en fêtant, à Paris, les 40 ans du SRI, le service des relations avec l’islam.

 

L’agence vaticane Fides, qu’on ne peut pas suspecter de rapporter une information infondée ou non vérifiée, relève la déclaration du Grand mufti d’Arabie : « Abdul Aziz bin Abdullah a souligné que l’élimination des églises serait en accord avec la règle séculaire selon laquelle l’islam est la seule religion praticable dans la péninsule arabique.».

Pendant ce temps on a pompeusement et à grand renfort de publicité relayé les conférences sur la rencontre islamo-chrétienne pour célébrer les 40 ans du SRI.

Avec des conférenciers tous très honorables et connus :

Mgr Jean Louis Tauran, Mgr Dubost et Mr Anouar Kbibech ;

M. Tareq Oubrou et le père Christophe Roucou etc.

J’ai failli ne pas parler de cette rencontre, quand m’est parvenue la déclaration du grand mufti de l’Arabie Saoudite, qui est en soi une réponse indirecte mais cinglante à ce dialogue qui dure depuis 40 ans !

D’abord disons le encore une fois, le dialogue en tant que tel, entre les hommes, est multiséculaire et multiforme. Et le dialogue de Dieu avec son peuple pareillement. Il ne s’agit pas de nier sa nécessité, mais de s’interroger sur celui qui a été entrepris depuis 1973, entre des officiels qui n’osent pas parler de ce qui fâche.

Faudrait-il attendre qu’ils soient touchés dans leurs chairs, pour qu’ils s’attaquent aux problèmes qui se posent en matière de persécution et de stigmatisation de ces deux catégories de chrétiens :

       les convertis de l’islam, condamnés à mort, purement et simplement, dans certains pays musulmans où la charia est appliquée, comme l’indique le cheikh Qaradawi.

       les chrétiens persécutés dans le monde qui le sont, le plus souvent en pays musulmans, et que l’on cache hélas pour ne pas incommoder ses interlocuteurs.

 

Qu’ajouter d’autre sur le manque de crédibilité d’un dialogue qui est tout sauf réaliste ? Il y est dit ici : « Une belle rencontre dans un dialogue de vérité qui sans nier les difficultés du dialogue a permis d’en cueillir les fruits et de partager des rêves d’avenir. »

Dialogue de vérité vraiment ?

J’espère alors que l’un ou l’autre des conférenciers a dit sa compassion pour ces croyants persécutés ; que l’un ou l’autre a demandé une minute de silence pour l’un ou l’autre de ces derniers attentats sanglants : Peshawar ; Kenya ; Nigéria  

Oh, bien sûr il ne s’agit pas de les accabler, car ils condamnent tous ces crimes. J’en suis convaincu. Mais cependant c’est bien au nom de l’islam que leurs auteurs ont agi. Ils ne peuvent pas dire qu’ils ne sont pas musulmans, car ils savent bien que, faute de magistère, tout musulman trouve en soi sa propre légitimité.

 

Du reste c’est à ce niveau que réside le problème majeur de ce dialogue islamo-chrétien : sa raison d’être et sa justification sont indiquées du côté catholique, ce qui fait que le père Christophe Roucou peut continuer légitimement la mission qui lui a été confiée ; mais du côté musulman où sont la légitimité et la justification ?

Prenons le cas de M. Tareq Oubrou, représente-t-il l’islam sunnite ? A-t-il reçu un mandat, et de qui, pour dialoguer au nom des musulmans ? En quoi serait-il plus représentatif que M. Hassan Chalghoumi, Rachid Benzine ou Abdennour Bidar ?

C’est cette question qu’il faut poser en revanche au père Christophe Roucou : comment choisissez-vous vos interlocuteurs ? Ou bien est-ce eux qui vous choisissent ?

Du moment que ce n’est pas pour aborder les problèmes des chrétiens persécutés, pourquoi ne dialoguez-vous pas avec les salafistes de banlieue parisienne ou lyonnaise ? Pourquoi pas avec les épiciers marocains du 15ème arrondissement de Paris ? Pourquoi n’allez-vous pas dialoguer avec les chômeurs musulmans qui font la queue à Pôle Emploi à Marseille ?

 

Car les fruits de ce dialogue, pour ma part, je ne les ai pas encore entrevus, mais ce n’est peut-être pas encore la bonne saison, une cinquième dont on rêve…

Ou bien, s’ils existent, ces fruits, pourquoi n’a-t-on jamais organisé une rencontre de ce fameux dialogue islamo-chrétien à Riyad ? Je ne parle même pas de Médine ou de La Mecque…à Riyad, est-ce trop demander ?

Dans un an, dans deux ans, est-ce impossible d’en rêver, puisqu’ils se sont surpris de « rêver de l’avenir » ?

I have e dream : une rencontre islamo-chrétienne à Ryad !

Mais si ce rêve-là est impossible c’est que ce dialogue-là est dans l’impasse et il faut le recycler.

Je propose du reste de créer un autre SRI, avec comme signification : Service des Relaps de l’Islam.

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Il faut dialoguer, oui, mais faut-il esquiver la question de ceux qui quittent l’islam et qui sont condamnés pour apostasie ?

Et ce qu’il ne faudrait pas prioritairement aborder la dignité et le respect dû à ces chrétiens d’Orient obligés de fuir ou de se convertir ?

Sur ces chrétiens d’Afrique et d’Asie, spoliés de leurs droits et régulièrement massacrés, faut-il continuer à fermer les yeux ?

Pourquoi ne pas discuter de ses travailleurs émigrés chrétiens, d’Afrique et d’Asie, qui travaillent et vivent dans la péninsule arabique, notamment en Arabie Saoudite, dans des conditions inhumaines parfois, sans pouvoir être assistés d’aumôniers ? Même dans les bagnes d’Alger et de Tunis, au plus fort de la course barbaresque, il y a eu des aumôniers pour assister les pauvres prisonniers chrétiens ! En Arabie Saoudite NADA !

 

Tant que le dialogue islamo-chrétien n’abordera pas ces deux questions cruciales, la persécution des chrétiens et la liberté de quitter l’islam, c’est en vain qu’ils prétendent honorer Dieu, comme dit l’auteur sacré en Isaïe 29,13.