Cette question a été posée il y a prés de 2000 ans.

Chaque génération de chrétiens a eu à y répondre : au temps d’Augustin d’Hippone (né en 354 après JC.) comme au temps de Jean de Damas (né vers 650 après JC.).

Et la génération actuelle, aussi, doit y répondre.

Quelle fut la réponse des premiers disciples, d’après l’Evangile?

Ils dirent : « Pour les uns, Jean le Baptiste ; pour d’autres, Elie ; pour d’autres encore, Jérémie ou quelqu’un des prophètes. »

Or, ce n’est pas la réponse des Apôtres, il s’agit de celle des gens, les « autres », ceux qui sont extérieurs au groupe des premiers disciples(1).

Mais quelle est donc la réponse de ceux-ci ? Ils n’eurent pas tous le loisir de la formuler, car Pierre, plein d’exaltation, à son accoutumée, les devança et déclara :

« TU ES LE CHRIST, LE FILS DU DIEU VIVANT. »

Le petit frère, signataire de ces réflexions, a pensé jusque-là, jusque dans les années 1990, que tous les chrétiens, et à tout le moins tous les catholiques, se reconnaissaient dans cette profession de foi, qui valut à son auteur la réponse de Jésus, que l’on connaît :

“Tu es heureux, Simon fils de Jonas, car cette révélation t’est venue, non de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux. Eh bien ! Moi je te dis : Tu es Pierre, et sur cette pierre je bâtirai mon Eglise…”

Ce passage de l’Evangile est, en effet, un pilier sur lequel est bâti l’Eglise, et particulièrement l’Eglise Catholique.

Conséquence logique, pour celui qui y adhère, tout ce qui en découle dans le message évangélique : l’Incarnation de Dieu, sa mort sur la croix pour la Rédemption de l’Humanité, et sa Résurrection.

Entre ces deux moments de sa vie terrestre, Noël et Pâques, il y a tous les faits et les gestes que nous rapportent les évangiles, parmi lesquels les signes, et non pas les miracles, attestant que Jésus vient de Dieu. Car il ne suffit pas de se déclarer « envoyé de Dieu », encore faut-il le prouver !

Il faut ajouter aux signes évangéliques, ceux-ci (dans les Actes), non par plaisir, mais parce que c’est également essentiel dans la fondation de l’Eglise et du Christianisme : l’Ascension, la Pentecôte et la conversion de Paul, ex Saul.

On peut comprendre qu’un non chrétien ne croit pas à l’un ou à tous ces événements « significatifs », mais pas quelqu’un qui se dit disciple du Christ.

Voici donc ci-dessous, chers frères et sœurs, quatre faits très récents qui inspirent, à votre serviteur, cette terrible réflexion : dans l’Eglise de France, aujourd’hui, nombre de chrétiens, et parmi eux, hélas, des prêtres, n’adhèrent plus à ces vérités.

Auparavant, qu’on nous permette de faire la distinction entre le miracle et le signe.

Bien que le miracle soit « un phénomène interprété comme résultant d’une intervention divine », selon la définition du dictionnaire, il diffère du signe, du verbe signer, en ce que ce dernier renvoie à une marque (de fabrique, si on veut), à un indice. Autrement dit un indice qui montre qu’il y a quelque chose, ou plutôt quelqu’un : c’est presque une preuve.

Un miracle n’est pas forcément un signe, et réciproquement.

Le miracle est de l’ordre de la science (phénomène inexpliqué), le signe est de l’ordre de la foi (c’est une preuve que cela vient de Dieu).

Une guérison miraculeuse à Lourdes, ou une apparition de la Vierge, ne sont pas des signes pour le chrétien : du reste l’Eglise reconnaît que les fidèles peuvent y croire ou pas. Tandis que le signe, corroborant la Révélation, est souvent un article de foi.

De sorte que, de ce point de vue, tous les miracles rapportés par les Evangiles sont des signes, et nous devons y croire, sans quoi notre foi est « branlante ».

Tant et si bien que nous avons ce passage de l’évangile de Jean (12,37) : « Bien qu’il eût fait tant de signes devant eux, ils ne croyaient pas en lui… »

Voici les faits.

Le 1er (en 2002) : Durant une séance de catéchisme, à des adultes, le petit frère s’est vu contesté après la lecture d’un passage d’évangile qui relate la marche sur les eaux du Christ, par des catéchistes comme lui : « tu ne crois tout de même pas à ces légendes !? » Il s’ensuit une discussion et, effaré, le petit frère constate que pour certains la conception virginale de Jésus était remise en question… !

Que dire? Peut-être que même le Coran en convient? Ce qui les remue et les trouble.

2ème fait (janvier 2004) : un diacre affirme tout de go qu’il ne croit pas à la conversion miraculeuse de Paul sur la route de Damas (Ac 9, 3 et suivants). Paul, selon lui, a eu un rêve (alors que les Actes assurent qu’il en devint aveugle), que « le rédacteur » de l’évènement a relaté une apparition du Christ conformément aux « procédés littéraires de l’époque ».

Peu de temps après, un prêtre, se disant en devenir (est-ce sur le plan de la foi ou sur la plan du ministère, je ne sais), ainsi qu’un autre, ayant de hautes fonctions dans son Eglise, avouent qu’ils ont du mal à ajouter foi à tous les « miracles » relatés par la Bible, « quand on pense que la Genèse a une version si étriquée de la création du monde, qui ne cadre nullement avec les découvertes de la science… »

Que leur dire? Peut-être ceci: parle divin Einstein, ton peuple écoute pour croire…

3ème fait (semestre 2005) : discussion avec un consacré, prétendant qu’il croit, en effet, qu’il y a plusieurs voies de salut, ce qui a révolté le petit frère qui lui a rétorqué : « mais bien sûr ! Allez au bout de votre raisonnement, pendant que vous y êtes : pourquoi ne suis-je pas resté un « bon musulman », j’aurais gagné mon ciel aussi bien, n’est-ce pas ? Et chantons tous ensemble, le tube de la fin des années 60, « nous irons tous au Paradis, qu’on soit voleur ou bonne soeur ! »

A ces personnes le petit frère, ironique, pour les mettre face à leur bêtise, y va de son commentaire : « Mais oui, bien sûr, et nous y verrons le petit père des peuples (Staline) tapoter le dos de Soljenitsyne et de ses camarades du Goulag, Hitler rigolant avec Edith Stein et jouant aux échecs avec Maximilien Kolbe et ses compagnons de cellule ? »

4ème fait (en ce premier semestre) : Une catéchiste, lors d’une rencontre préparatoire à un baptême, qui plus est, fait remarquer, sans état d’âme, qu’elle ne croit pas aux miracles de Jésus ! « Et sa résurrection, Madame ? » Sa réponse : « Oh ! Vous savez, même les évangiles ne disent pas que quelqu’un l’a vu sortir du sépulcre ! »

Que voulez-vous répliquer à cela ? Que nous n’avons pas la même foi ? Cela semble évident !

D’ailleurs, peu de temps après, un consacré soutient, de son côté, qu’il ne croit pas que Jésus soit monté au ciel, « avec des ailes qui lui auraient poussé subitement ! C’est, ajoute-t-il, comme cette incroyable « fabrication » de la première femme, Eve, à partir de la côte d’Adam ! »

– Mon père, dois-je continuer à vous appeler ainsi ? Ou bien je ne suis pas catholique ou bien vous ne l’êtes pas !

Mais étant « un Algérien pas très catholique », c’est évidemment le petit frère qui n’est pas très catholique…

Des dizaines de faits similaires pourraient être rapportés.

Il convient d’ajouter que, dans le cas où on soutiendrait le contraire, face à ces éminences grises et exégétiques, nous avons, inévitablement, un hochement de tête en guise de remarque accompagnée de cette formule invariable : « ne soyez pas fondamentaliste, voyons ! » Encore heureux si l’on ne nous traite pas d’extrémistes ! Ou poseurs de bombes…spirituelles !

Convenons que, si les signes contenus dans les évangiles ne sont pas avérés pour nous, vide est notre foi. On ne peut pas plus alléguer que tels passages sont authentiques, mais pas tels autres : c’est aller dans le sens du Coran qui affirme que la Bible est « falsifiée ».

Si nous n’ajoutons pas foi au témoignage des Ecritures, telles qu’elles nous ont été transmises par les Apôtres d’abord, puis les Martyrs, les Pères et les Docteurs, leurs disciples et successeurs – toute cette continuité historique que revendique l’Eglise -, nous ne sommes plus des disciples du Christ.

Il vaut mieux ne plus se dire chrétien.

D’ailleurs où est le problème ? Si Dieu est Dieu, est-il quelque chose qui Lui soit impossible ?

Qu’est-ce que c’est que ce Dieu limité, à qui on ne permet que ce que l’on comprend avec notre petit cerveau et nos mesures scientifiques ?

Pouvons-nous comprendre Celui qui a créé l’univers à partir de rien ? Il faut dire, du reste, l’espace-temps : dans cette belle formule nous avons l’indexation de la matière au temps. De la même manière les créatures sont « indexées » à cet espace-temps : nous sommes limités et dans le temps et dans notre matière constitutive.

Comment pourrions-nous, en conséquence, appréhender Celui qui est en dehors du temps et de l’espace ?

« Où étais-tu quand je fondai la terre ? » demande Dieu à Job (Jb 38,4).

Car finalement le nœud du problème est là : la Bible ne racontant pas dans le détail ce qu’elle avance, et se trouvant parfois en contradiction avec la science expérimentale, on en conclut que ses récits ne sont que mythes et légendes.

Mais Jésus est venu confirmer cela.

Est-ce que Jésus nous aurait trompés aussi ?

Voici quelques unes de ses paroles :

– Car je vous le dis, en vérité : avant que ne passent le ciel et la terre, pas un i, pas un point sur le i, ne passera de la Loi, que tout ne soit réalisé. Mt 5,18

– Je vous le dis, si eux se taisent les pierres crieront (Lc 19,40), à rapprocher d’un texte proche en Mt 3,8 : « et ne vous avisez pas de dire en vous-mêmes : « Nous avons pour père Abraham ». Car je vous le dis, des pierres que voici, Dieu peut susciter des enfants à Abraham. »

– Heureux les cœurs purs : ils verront Dieu. Heureux ceux qui font œuvre de paix : ils seront appelés fils de Dieu. Mat 5,8-9

– Le ciel et la terre passeront, mes paroles ne passeront pas. Lc 21,33

– Cette phrase du centurion (Mt 8,8-10) : « Seigneur je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit : dis seulement un mot et mon serviteur sera guéri…Jésus fut plein d’admiration, en l’entendant, et dit à ceux qui le suivaient : « En vérité, je vous le déclare, chez personne en Israël je n’ai trouvé une telle foi. » Phrase qui prouve que c’est souvent la foi qui nous manque, sans quoi tout est possible à Dieu.

– Je te loue, Père, Seigneur du ciel et de la terre, d’avoir caché cela aux sages et aux intelligents et de l’avoir révélé aux tout-petits. Oui, Père, c’est ainsi que tu en as disposé dans ta bienveillance. (Mt 11,25-26) Où il est clairement indiqué que Dieu se moque des présomptueux qui cherchent, en se passant de Lui, à comprendre les choses « cachées » depuis la fondation du monde.

– Fixant sur eux son regard, Jésus leur dit : « Aux hommes c’est impossible, mais à Dieu tout est possible. Mt 20,26

– Jésus leur répondit : « Vous êtes dans l’erreur, parce que vous ne connaissez ni les Ecritures ni la puissance de Dieu. Mt 22,29

– Mais Dieu lui dit : ‘Insensé, cette nuit même on te redemande ta vie, et ce que tu as préparé, qui donc l’aura ? Lc 12,20

– Jésus leur dit : « Vous, vous montrez votre justice aux yeux des hommes, mais Dieu connaît vos cœurs : ce qui pour les hommes est supérieur est une horreur aux yeux de Dieu. » Lc 16,15

– Il leur dit : « A cause de la pauvreté de votre foi. Car, en vérité je vous le déclare, si un jour votre foi est semblable à une graine de moutarde, vous direz à cette montagne : « Passe d’ici là-bas », et elle y passera. Rien ne vous sera impossible. Mt 17,20

Nous conclurons sur cette dernière parole : notre foi est souvent d’une pauvreté « incroyable ». De ce fait, nous adaptons Dieu à notre pauvre foi, au lieu de Lui demander d’augmenter en nous la foi.

Cessons donc de lui poser des limites : ce Dieu en qui nous croyons, nous n’avons jamais fini de Le découvrir : Il est le tout autre, Celui qui se révèle.

Avec Lui toute recherche présomptueuse est vaine : c’est comme le rocher de Sisyphe, qui sans cesse retombe sur nous.

Si nous ne comprenons rien à rien, dans ses œuvres comme dans ses plans, n’oublions pas que nous sommes des créatures finies, à qui a été alloué un temps donné. Même les connaissances et tout le savoir que nous engrangeons durant notre vie, ne nous appartiennent pas et s’évanouiront avec notre dernier souffle. Avec quels moyens prétendrions-nous comprendre Dieu ?

Ce grand serviteur de Dieu, notre ancêtre dans la foi, Augustin de Thagaste, disait en ses confessions :

« Que tes Ecritures soient mes chastes délices, que ni je me trompe sur elles ni ne trompe en me servant d’elles. Pitié, Seigneur mon Dieu ! »

Cet humble docteur de l’Eglise, qui avait appris, à ses dépens, ce que signifie « chercher à comprendre » hors de Dieu, puis se ravisant, ne chercha plus qu’en Dieu, nous éclaire encore sur les croyants savants et prétentieux qui voudraient se passer de l’aide de l’Esprit :

« Mais que, dédaignant tes paroles comme de bas prix, l’un d’eux s’étende, imbécile et superbe, hors du berceau nourricier, hélas ! Il tombera, le pauvre ! Ah ! Pitié pour lui, seigneur Dieu ! Que les passants du chemin n’écrasent point l’oiselet sans plumes ! Envoie ton ange pour le reporter au nid. Puisse-t-il vivre jusqu’à tant qu’il vole ! »

La foi se nourrit des Ecritures, mais si on les méprise elle s’étiole et s’évapore sous les ardeurs du soleil.

VOUS DONC, ECOUTEZ LA PARABOLE : « QUAND L’HOMME ENTEND LA PAROLE DU ROYAUME ET NE COMPREND PAS, C’EST QUE LE MALIN VIENT ET S’EMPARE DE CE QUI A ETE SEME DANS SON COEUR; TEL EST CELUI QUI A ETE ENSEMENCE AU BORD DU CHEMIN. » Mt 13,18-19

À bon entendeur salut!

(1) Tout comme aujourd’hui, les non chrétiens, diront de Jésus que c’est un prophète pour les uns (les musulmans), que c’est un révolutionnaire (les adeptes de la « théologie de la révolution ») ou un grand homme plein d’humanité (Renan), enfin, pour les plus pernicieux, que c’est un imposteur qui a eu des relations sexuelles avec Marie-Madeleine. On voit que, selon le “livre” auquel on se refère (le Coran, le Capital, la vie de Jésus par Renan ou Da Vinci Code) Jésus est défiguré à qui mieux mieux!

Une image copte, en hommage au courage des Coptes

 

Notre-Dame d'Afrique, l'intérieur