J’ai écrit en juin 2016, dans la revue “Reconquête” un article intitulé : Ex-musulman cherche évêque catholique désespérément. Un ex-musulman, vieux baptisé de 49 ans, qui ne trouve toujours pas son évêque, est-ce possible ?

Oh ! Ce n’est pas qu’il n’y en ait nulle part à travers les vastes territoires où s’est implanté notre Eglise catholique. Mais faut-il aller le chercher sur un autre continent, dans un autre pays d’Europe ? En France même pourquoi aller dans un autre diocèse que celui où j’habite ? Quel est le problème du reste, pourquoi poser une telle question ?

Eh bien ! C’est en raison d’une exigence essentielle, pour un musulman. Il a besoin, avant de recevoir le baptême, de régler la question redoutable de savoir, de l’Évangile ou du Coran, qui dit vrai ? Lequel vient de Dieu, Jésus Christ ou Mahomet ? Ce n’est pas une affaire superficielle la conversion ;  l’enjeu est la vie ou la mort éternelle. Et Dieu Lui-même nous prévient, par la bouche du Baptiste d’abord : Races de vipères, qui vous a appris à fuir la colère à venir ? Produisez donc du fruit digne de la repentance… (St Matthieu 3, 7-8) Et par la bouche du Sauveur, avant de monter au Ciel : Ainsi il est écrit que le Christ souffrirait, et qu’il ressusciterait des morts le troisième jour, et que la repentance et le pardon des péchés seraient prêchés en son nom à toutes les nations, à commencer par Jérusalem. Vous êtes témoins de ces choses. (St Luc 24, 46-48)

Quant au Coran, il y est écrit en sourate 24, versets 56 et 57 : Accomplissez la Salat, acquittez la Zakat et obéissez au Messager, afin que vous ayez la miséricorde. Ne pense point que ceux qui ne croient pas puissent s’opposer à l’autorité d’Allah sur terre. Le Feu sera leur refuge. Quelle mauvaise destination.

Donc il est bien clair que nous ne pouvons pas suivre à la fois Jésus et Mahomet. Dieu, ayant tout accompli sur la croix en Jésus Christ, comme le dit l’évangile, se serait-il ravisé six siècles après pour faire descendre sur Mahomet un autre message de salut, celui du Coran ? Hormis les incroyants qui ne sont pas intéressés et ne croient pas au salut de leur âme, je ne vois pas comment les chrétiens peuvent échapper à cette alternative : soit le Coran ne vient pas de Dieu, et donc Mahomet est un imposteur, soit c’est l’Évangile qui est faux et, dans ce cas, l’histoire de Jésus est une imposture.

Pour le musulman, tant qu’il n’a pas découvert le Jésus de l’Évangile, il ne se pose pas de question sur la supériorité de l’islam, dernière religion révélée corrigeant les précédentes, attestée par le sceau des prophètes, Mahomet. D’où la confession de foi musulmane : « il n’y a de divinité qu’Allah, Mohammed est messager d’Allah ». Il faut bien voir que corriger signifie que, sous le nom d’Aïssa dans le Coran, Jésus n’est pas Sauveur et encore moins Fils de Dieu, qu’il est un simple prophète annonçant le suivant. Les conséquences que l’islam en tire sont définitives : le Jésus des « Nazaréens » actuels, nom sous lequel les chrétiens sont désignés dans le Coran, n’est pas le vrai ; le vrai s’appelle Aïssa et il est musulman comme Marie sa mère ; ses disciples « monothéistes » ont disparu ; l’Eglise n’a pas été fondée par Aïssa – et pour cause ! Le christianisme est déclaré caduc ; l’islam a pour vocation de « récupérer » ses adeptes. Toutes les contorsions des catholiques qui s’acharnent à unir christianisme et islam sont des postures relativistes qui mènent à une confusion généralisée. Le résultat est que, dans le Coran, non seulement nous avons un autre Jésus, Aïssa, mais un autre évangile, l’INJIL. Or que nous dit l’Ecriture ? Mais, quand nous-mêmes, quand un ange du ciel annoncerait un autre Évangile que celui que nous vous avons prêché, qu’il soit anathème !  (Gal. 1,8)

L’ex-musulman qui a répudié toute cette construction religieuse, qu’il estime infondée comme le lui révèle l’évangile, qui a pris tous les risques inhérents à la loi islamique sur l’apostasie pour recevoir le baptême et suivre le Christ, ne comprend pas que tel prêtre ou, plus grave, tel évêque lui assène que l’islam est une religion de paix et d’amour, mettant en doute ses propos qui sont pourtant vérifiables en consultant les textes sacrés musulmans. Le converti que je suis, a souvent l’impression d’être, aux yeux de ces ecclésiastiques mais aussi des simples laïcs, un mythomane voire un menteur, pétri d’islamophobie [SIC]. D’autres m’ont tenu un double langage ; en privé ils concèdent que nous avons raison et critiquent l’islam de manière appropriée mais leurs discours ou leurs écrits ne reflètent pas leur opinion, à cause du religieusement correct ; ce sont des attitudes que j’appelle schizophréniques dictées par la peur du monde et non par le service à rendre à la vérité. Que y a-t-il d’aberrant en effet de dire qu’aux yeux d’un chrétien l’islam n’est pas une voie de salut ? La charité chrétienne m’interdit de donner des noms de prêtres ou d’évêques qui nous accueillent, ou ne nous accueillent pas, dans la plénitude de notre démarche de conversion, qui passe forcément par le rejet de la foi musulmane. A quoi bon ? Ce serait mal compris et considéré comme de l’aigreur ou de la rancœur.

Ce manque de compréhension de la part de certains chrétiens s’ajoute ainsi au mépris et à la persécution dont nous sommes l’objet de la part de nos ex-coreligionnaires. Selon la parole du Seigneur : Heureux serez-vous, lorsqu’on vous outragera, qu’on vous persécutera et qu’on dira faussement de vous toute sorte de mal, à cause de moi. Pour autant faut-il se taire sur l’existence de cette dissimulation de la vérité ? Ou, peut-être, un manque de foi qui frise l’apostasie de la foi catholique de toujours ? En vérité si l’islam était une religion de paix, elle ne poursuivrait pas de sa vindicte ceux qui la quittent et on n’y trouverait pas de condamnation à mort de l’apostat. En particulier et surtout si Jésus, et sa mère, sont honorés par les musulmans, comme cela se dit, pourquoi punir d’un châtiment cruel ceux qui deviennent ses disciples ? Bref après une longue tentative « d’accommodement » qui se chiffre en années, avec ces chrétiens peu sûrs de leur foi ou qui lui ôtent toute aspérité, pour ne pas contrarier les musulmans avec lesquels ils dialoguent, j’ai pris la décision de cesser dorénavant toute collaboration avec eux. Je ne veux plus feindre. Ceci pour en finir avec la double soumission que cela engendre, notamment auprès des clercs, à savoir le respect que je leur dois en tant que représentants du Seigneur et, par suite de leur attitude envers les musulmans, la dhimmitude qui en résulte.

En conséquence de quoi je me considère comme orphelin d’évêque. Je cherche celui qui, successeur des apôtres, transmet sans honte, ou plutôt avec fierté, le précieux dépôt dont parle Paul à Timothée. Puisque ce n’est pas à Pierre, à Apollos, à André, à Philippe ou à Michel que je me suis converti, mais à Jésus Christ qui me pardonne mes péchés et me sauve du feu éternel. Comme on le voit cela touche à la dignité du chrétien et à sa liberté d’enfant de Dieu. Mais cela touche aussi, pour l’ex-musulman que je suis, à la cohérence de ma vie, vis-à-vis de Dieu et vis-à-vis des hommes, notamment mes frères de sang musulmans. L’un de ces frères musulmans m’a dit récemment :

  • J’aime bien ton pape actuel qui accueille les musulmans sans leur proposer de se convertir. Avec lui tu n’aurais pas eu besoin de devenir Christophe, et tu n’aurais pas eu à quitter notre religion. Que penses-tu de lui, car je l’apprécie vraiment personnellement ? C’est le meilleur de tous les papes récents.
  • Je suis heureux d’apprendre que tu l’as adopté et que tu as un pape à présent, lui ai-je répondu. Quant à moi je suis un orphelin de pape.

Eh bien aujourd’hui, après la publication de la lettre ouverte aux évêques catholiques, non seulement je ne suis plus seul à être orphelin de Pape, mais j’envisage de rester dans l’Eglise catholique “ordinaire” au lieu de “migrer” vers la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X, la partie de “l’Eglise extraordinaire” dans la liturgie divine, comme je pensais le faire à l’anniversaire de mes 50 ans de baptême, c’est-à-dire l’année prochaine..