Au début du 5ème siècle, Hésychius (évêque de Salonne en Dalmatie) consultait saint Augustin (évêque d’Hippone) sur l’interprétation des textes de l’Évangile relatif à la fin des temps. Il en est résulté trois échanges de lettres. Dans la dernière lettre, le théologien berbère commente en particulier les versets 24, 29-30 de l’évangile de Matthieu, où sont mentionnés des phénomènes cosmiques annonçant le retour du Christ :

Et aussitôt après l’affliction de ces jours-là le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera point sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, et les puissances des cieux seront ébranlées. Alors le signe du Fils de l’homme paraîtra dans le ciel; alors aussi toutes les tribus de la terre se lamenteront, en se frappant la poitrine, et elles verront le Fils de l’homme venant sur les nuées du ciel, avec une grande puissance et une grande gloire“.

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L’intérêt du commentaire de Saint Augustin réside dans sa recommandation de ne pas s’attacher au sens ” cosmique” des phénomènes mentionnés (qui pourraient se produire ainsi, ou non?), car ces versets ont un sens spirituel concernant l’état de l’Église à l’approche de la fin des temps :

Je pense qu’il serait mieux d’entendre ces choses de l’Église elle-même, de peur que le Seigneur Jésus ne paraisse avoir annoncé comme une grande marque de son second avènement, ce qui s’est déjà vu en ce monde avant même la naissance du Christ, et de peur que nous ne soyons l’objet des railleries de ceux qui nous montreraient dans l’histoire de plus grandes calamités, que celles que nous regarderions avec effroi comme les signes de la fin du monde. L’Église est représentée par le soleil, la lune et les étoiles. […]. Quand le soleil sera obscurci, et que la lune ne donnera plus sa lumière et que les étoiles tomberont du ciel et que les vertus des cieux seront ébranlées, comme il est dit dans les évangiles de saint Matthieu et de saint Marc, l’Église en quelque sorte ne se verra plus; elle sera, au delà de toute mesure , en proie à la persécution des impies qui, ne craignant plus rien et au comble des félicités humaines, s’en iront, répétant : « La paix et la sûreté sont avec nous. » Alors les étoiles tomberont du ciel et les vertus des cieux seront ébranlées ; ce qui veut dire que plusieurs qui naguère semblaient resplendir par la grâce, fléchiront devant les persécuteurs et tomberont : quelques-uns même des plus forts seront ébranlés”.

S’appuyant sur ce passage de la lettre à Hésychius, Nicolas Le Tourneux, auteur de “L’année chrétienne: contenant l’explication des Épitres et Évangiles pour les dimanches, les festes de l’année” (Paris, chez Desaint et Sallant, 1746, 13 volumes) explique l’évangile du premier dimanche de l’Avent (tome 1) en l’adaptant à la situation de l’époque (18ème siècle). Il précise un peu plus, en un sens spirituel, ce qu’il arrivera dans l’Église en lien avec tout ce que Jésus marque devoir arriver dans la nature au temps de Son avènement. Jésus, le Soleil de l’Église (puisqu’elle tire de Lui toute Sa lumière) sera obscurci, parce qu’à peine le connaîtra-t-on, lui-même assurant qu’il trouvera peu de foi. L’Église, figurée par la Lune qui reflète la lumière du soleil, sera sans éclat par la difficulté de la discerner des sociétés du Monde, engendrées par l’égarement des hommes. “Elle sera toute rouge que les persécutions répandront de tous côtés. Plusieurs de ceux qui, par leur doctrine et leur piété, brillaient comme des astres, tomberont du ciel, et sortiront de l’Église”. D’autres, par peur des persécutions renonceront à leur foi. D’autres, paraissant les plus fermes, regardés comme les puissances des Cieux, seront ébranlés, car marginalisés et renversés par la généralisation de la confusion qui régnera alors.

Pour les prophéties, il est toujours imprudent de tenter d’exercer son discernement, faculté qu’on n’est jamais certain de posséder. Cependant l’actualité (surtout en France et en Europe) fait penser que nous vivons des temps pour lesquels la guerre entre l’Église et le Monde (au sens johannique) a atteint une phase particulièrement aigüe. De cet affrontement, annoncé par Jésus (“le Monde vous haïra comme il M’a haï”), Saint Augustin en parle dans “La Cité de Dieu“, et Saint Ignace de Loyola en fait la méditation “Les 2 étendards” de ses exercices spirituels. On voit plus clairement les choses si l’on accepte que l’Église est le Corps du Christ. On peut alors naturellement se demander si, actuellement, l’Église ne revit pas la passion du Seigneur, ceci depuis la crise moderniste dénoncée par Saint Pie X, dans son encyclique Pascendi Dominici gregis (08/09/1907). Cette phase critique est celle de l’amplification contemporaine des persécutions antichrétiennes dans le monde, à un niveau jamais atteint depuis les persécutions romaines. C’est aussi celle “de ceux qui, par leur doctrine et leur piété, brillaient comme des astres“, i.e. prêtres, religieux, théologiens, qui adhérent aux idéologies et aux “valeurs” du Monde, soit en quittant l’Église, soit en y restant et ainsi y instillant leurs hérésies. Ceux-ci sont “tombés du ciel” sur la terre par leur compromission avec le Monde. Dans cette catégorie, on peut distinguer les prêtres rejetant le magistère romain, ceux qui se livrent à l’invention liturgique, transforment la messe essentiellement théocentrique en une cérémonie anthropocentrique. Parmi eux, on peut aussi reconnaître les prêtres, défroqués, ou vivant en concubinage, ou pédophiles, ceux qui pratiquent la pastorale (ou théologie) de l’enfouissement, visant à faire disparaître toute visibilité de l’Église (d’où une baisse spectaculaire des vocations), le lobby gay du Vatican dénoncé par le Pape François (VOIR), les théologiens modernistes condamnés, et interdits d’enseignement dans les universités catholiques. A ceci il faut ajouter l’infiltration de la franc-maçonnerie. Pascal Vesin, curé de la paroisse Sainte-Anne d’Arly-Montjoie, à Megève, adhérent actif du Grand Orient de France (LIRE), en est un exemple. A un plus haut niveau de l’Église, on a le cas de Mgr Bugnini (CF), responsable de la réforme liturgique de 1967 à 1969, sur lequel pesaient de très forts soupçons. Démis de ses fonctions par Paul VI en le nommant pro-nonce apostolique en Iran (1976), il a considéré ceci comme une sanction (cf. “Trente jours dans le monde et dans l’Église” [*], n° 6, 1992, pages 35-47).

Le contexte de cette époque a fait dire à Paul VI: “ Devant la situation de l’Église d’aujourd’hui, nous avons le sentiment que par quelque fissure la fumée de Satan est entrée dans le peuple de Dieu” (Paul VI, Homélie 29 juin 1972). Ce Pape a ainsi parlé d’un mécanisme d’autodestruction: “L’Église se trouve en une heure d’inquiétude, d’autocritique, on dirait même d’autodestruction. C’est comme un bouleversement intérieur, aigu et complexe, auquel personne ne se serait attendu après le Concile. On pensait à une floraison, à une expansion sereine des conceptions mûries dans les grandes assises du Concile.” (Paul VI, déclaration du 7 décembre 1968, citée in “Documentation catholique” du 5 janvier 1969, col. 12). Ce cri douloureux de Paul VI est réellement celui de l’Église, Corps du Christ, vivant la Passion du Seigneur.

Quant à la question d’une “mort apparente” de l’Église, suivie de sa résurrection avec le retour du Christ, nul ne peut en prévoir la date: “Seul le Père la connaît“. Saint Augustin le rappelle dans sa lettre à Hésichius, où il s’attache à prouver qu’on ne peut rien savoir sur l’époque de la fin des temps (Saint Augustin a mentionné cette lettre dans le XXe livre, chap. V, de la Cité de Dieu). L’évêque d’Hippone note cependant :

Pour ce qui est du temps marqué, il n’arrivera pas avant que l’Évangile soit prêché au monde entier pour servir de témoignage à toutes les nations. Rien de plus clair que cette parole du Sauveur: «Cet Évangile sera prêché à toute la terre pour servir de témoignage à toutes les nations, et alors la fin viendra (Matth. XXIV, 14). » Alors la fin viendra; n’est-ce pas dire qu’elle ne viendra pas avant? Combien de temps viendra-t-elle après? C’est là une chose incertaine. Ce qu’il y a de certain, c’est qu’elle n’arrivera pas auparavant. Si des serviteurs de Dieu entreprenaient de parcourir l’univers pour se rendre compte de ce qui reste de nations auxquelles l’Évangile n’a pas été annoncé, nous pourrions nous faire quelque idée des temps qui s’écouleront d’ici à la fin“.

Or, actuellement, les moyens modernes de communication (via Internet, et la télévision par satellites) ont permis l’annonce de l’Évangile à tous les peuples, même musulmans, ce qui était impensable avant. Maintenant des hommes et femmes musulmans peuvent avoir un contact direct avec le christianisme, religion imprégnée d’une liberté inexistante dans leur culture d’origine, ceci joint au libre accès à un vaste éventail d’informations, accès inconcevable il y a une quarantaine d’années. Les musulmans ont ainsi la possibilité d’exercer leur libre arbitre en matière religieuse et philosophique (CF. l’article). Il en résulte une situation nouvelle illustrée par les éléments qui suivent:

– Interviewé par Aljazeera Network en 2007, le Sheikh Ahmad Al Katani (en Lybie, president of The Companions Lighthouse for the Science of Islamic Law) dit à ce sujet: “En Afrique, chaque heure, 667 musulmans se convertissent au christianisme. Chaque jour 16.000 musulmans convertissent au christianisme. En une année, 6 millions de musulmans convertissent en christianisme.(VOIR).

– Sur la base d’une étude de l’ONG internationale “Open Doors” (Portes Ouvertes), en Iran le nombre de musulmans qui se convertissent au christianisme explose. Il y a 40 ans, le nombre de chrétiens auparavant de confession musulmane était estimé à 400. Aujourd’hui, ils seraient environ 370 000, ce phénomène étant particulièrement répandu parmi les jeunes générations. Ceci dans un pays classé au cinquième rang de l’index publié par Portes Ouvertes sur les pays considérés comme les plus répressifs envers les chrétiens dans le monde. Les membres de “Open Doors” estiment que la montée du christianisme est liée au fait que les Iraniens prennent de plus en plus conscience du visage réel de l’islam à travers le comportement des dirigeants religieux du pays.

– Le président de Portes Ouvertes, Carl Moeller, estime quant à lui que le phénomène ne se limite pas seulement à l’Iran : “dans tout le Moyen Orient, affirme-t-il, l’Église « invisible » grandit. Invisible parce que le passage de l’Islam au christianisme est dangereux, pour ne pas dire impossible dans cette région. Les hommes et femmes en raison de la situation spirituelle dans laquelle ils vivent, se tournent vers la foi en Jésus-Christ, un choix qui peut leur fait courir des risques mortels“.

– Selon l’organisation musulmane “The Mercy” chaque année 2 millions d’Indonésiens quitteraient l’islam pour devenir chrétiens (VOIR). Ce nombre élevé préoccupe cette organisation qui a décidé de lancer une campagne de communication, avec une chaine de télévision islamique gratuite à destination de la jeunesse.

– Nazir Ahmad Hanafi, un parlementaire afghan, demande que les musulmans qui se convertissent au christianisme soient exécutés, en vertu de la charia, le droit islamique. Il y voit la bonne manière de mettre un terme à la croissance rapide du christianisme parmi les citoyens afghans dans le pays et à l’étranger(VOIR).

– En 1980, les Adjars, habitants d’Adjarie, la république autonome de Géorgie, étaient musulmans. Il n’y avait qu’une seule église, à Batoumi. Aujourd’hui, 75% des 400 000 adjars sont devenus orthodoxes (ICI et INFO)

– Dans son livre “Des musulmans qui deviennent chrétiens” (Editions Qabel, 2013,LIVRE, la première édition a été épuisée en 6 mois), Moh-Christophe Bilek nous parle plus précisément des témoignages de convertis francophones en nombre croissant qui, en quittant l’islam, ont vu en Jésus “le Chemin, la Vérité et la Vie“. Abordant la question des fins dernières, pages 296-297, l’auteur fait apparaître un sujet qui a été source de réflexions pour de nombreux convertis, et qui trouble beaucoup les musulmans: l’islam dit que c’est Jésus qui revient à la fin des temps et non Mahomet. Des détails sont donnés sur certains sites islamiques [(LIRE 1) et (LIRE 2)]

Dans une citation, reproduite ci-dessus, Saint Augustin dit: “Si des serviteurs de Dieu entreprenaient de parcourir l’univers pour se rendre compte de ce qui reste de nations auxquelles l’Évangile n’a pas été annoncé, nous pourrions nous faire quelque idée des temps qui s’écouleront d’ici à la fin“. Or l’Évangile est maintenant bien annoncé dans le monde entier. Cependant il reste toujours difficile d’avoir une idée de ces “temps qui s’écouleront d’ici à la fin “. Plus haut Saint Augustin note justement que “C’est là chose incertaine“. Une profusion de messages de mystiques contemporains nous annonce le retour du Christ comme très proche. Les Écritures disent bien:

– “Il se passe aujourd’hui ce qui a été prédit par le prophète Joël, à savoir : Il arrivera dans les derniers jours que je répandrai mon Esprit sur toute chair, vos fils et vos filles prophétiseront, vos jeunes gens auront des visions, vos vieillards auront des songes” (Act.2, 16-17)

– “Le Seigneur ne fait rien sans avoir révélé son secret à ses serviteurs” (Am. 3-7).

N’éteignez pas l’Esprit, ne dépréciez pas les dons de prophétie; mais vérifiez tout : ce qui est bon, retenez-le; gardez-vous de toute espèce de mal. (1 Thess 5, 19-22).

De son côté Saint Thomas d’Aquin (Som. Théol. II-II Q 171-174) confirme l’intervention de prophètes, jusqu’à la fin des temps pour diriger les actions des hommes, afin qu’ils ne s’égarent pas. Il n’en reste pas moins vrai que l’exercice du discernement reste aussi difficile, et reste le privilège de quelques très rares personnes. Le but de certains “messages“, et leur multiplication, pourraient être aussi de semer la confusion dans les esprits? Contentons nous donc de ne retenir que le signe donné dans l’Évangile au sujet du retour du Christ: “Quand donc vous verrez l’abomination de la désolation, dont a parlé le prophète Daniel, établie dans le lieu saint, que celui qui lit comprenne” (Mt 24,15).

Dans le livre de Daniel (Dan. 12, 9-12) “l’abomination de la désolation” est directement liée à l’abolition du “Sacrifice quotidien“, qui a eu lieu chez les juifs avec la destruction du temple de Jérusalem. Or l’Ancien Testament, outre le sens littéral et historique, renferme un sens spirituel qui est la signification des mystères de la Loi Nouvelle, à travers les actes des Patriarches et Prophètes. Pour la Loi Nouvelle, “la Sainte Messe est le Sacrifice quotidien, l’oblation pure offerte au Seigneur sur tous les autels“. C’est ce que dit Marie à don Gobbi, dans son message n° 485 du 31/12/1992 (“Aux Prêtres, les fils de prédilection de la Vierge“, édition MSM française). Par rapport à la majorité des révélations contemporaines, celle-ci présente une caractéristique spécifique: la création du Mouvement Sacerdotal Marial (MSM) demandée par la Vierge dès son 2ème message (08/07/1973). Ce mouvement a alors très vite regroupé de très nombreux prêtres, évêques, cardinaux du monde entier, et a bénéficié du soutien paternel de Jean-Paul II, puis de Benoît XVI. On peut donc penser qu’une éventuelle future abolition de toute référence au renouvellement du Sacrifice non sanglant du Christ, offert sur l’autel de la Messe, serait alors “l’abomination de la désolation dont a parlé le prophète Daniel, établie dans le lieu saint“, le prêtre agissant in nomine (au nom) et in persona (en personne) Christi (du Seigneur). Si ceci devait se faire dans le but de rapprocher toutes les croyances, il ne fait pas de doute que l’Église deviendrait l’objet des éloges du Monde, autre signe qui confirmerait que “la fumée de Satan” a submergé le peuple de Dieu. Malgré des tentatives de rapprochement avec les protestants, et certaines ambigüités modernistes sur la présence réelle, et le sens de la transubstantation (CF.), on n’est pas encore au niveau d’une altération essentielle de l’Eucharistie, centre de la foi catholique, qui entrainerait celle de la structure de la Messe et des sacrements par leur désacralisation, indices de proximité pour le retour du Christ. De même, plus généralement, quand la “haine du Monde” deviendra louanges, quand les sarcasmes des médias dominants se changeront en approbations, il faudra y voir un signe. En attendant, comme le dit le théologien berbère à propos de la date de ce retour: « C’est là chose incertaine »

En lien direct avec le commentaire de Saint Augustin sur les versets 24, 29-30 (évangile de Matthieu), nos sociétés occidentales vivent un autre signe: une déchristianisation inquiétante associée à une christianophobie croissante. En se basant sur une enquête de l’IFOP, et sur le critère de la pratique religieuse, le Gatestone Institute conclut que l’islam est déjà devenu la première religion en France (cf.Islam Overtaking Catholicism in France). En 2020-2030 Bruxelles devrait être à majorité musulmane (VOIR). Cependant les conversions des musulmans au christianisme (dont on parle bien peu?) sont de plus en plus nombreuses. Tout se passe comme si nos sociétés occidentales apostates, aveugles, interpelaient le Seigneur pour justifier le rejet de Son message, dans les mêmes termes que les scribes et les pharisiens:

“… Maître, nous désirons voir un signe de ta part. Mais lui, répondant, leur dit : Une génération méchante et adultère recherche un signe ; et il ne lui sera pas donné de signe, si ce n’est le signe de Jonas le prophète. Car, comme Jonas fut dans le ventre du cétacé trois jours et trois nuits, ainsi le fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre. Des hommes de Ninive se lèveront au jugement avec cette génération et la condamneront, car ils se sont repentis à la prédication de Jonas, et voici, il y a ici plus que Jonas. ” (Matthieu, 12, 38-40).

Ce texte évoque la demande que Dieu a faite à son prophète Jonas : aller à Ninive (ennemie du peuple hébreu) pour annoncer Sa Parole aux païens. En recevant cette Parole, ceux-ci se sont repentis, ont fait pénitence, échappant ainsi à la colère de Dieu.

Dans son livre “Le Christ hébreu” (Ed. O.E.I.L., Paris, 1986) Claude Tresmontant [**] considère que la phrase “Car, comme Jonas fut dans le ventre du cétacé trois jours et trois nuits, ainsi le fils de l’homme sera trois jours et trois nuits dans le sein de la terre” est un ajout de l’évangéliste, écrit à un moment où la conversion des païens du bassin méditerranéen (image de celle des ninivites) n’avait pas encore débuté (pages 56-61). L’évangéliste a alors cru bon d’ajouter l’explication du “ventre du cétacé” en relation avec le séjour de Jésus dans le tombeau, avant Sa résurrection. Or ce séjour n’a pas duré trois jours et trois nuits, et l’explication logique du signe de Jonas est celle de la conversion des ninivites, assimilée à celle, non encore réalisée, des païens du bassin méditerranéen. Lors de la rédaction de cet évangile, le signe de Jonas n’était pas accompli, car réalisé à partir de l’année 36, après la mise à mort d’Étienne. Tresmontant note qu’alors l’évangéliste “n’a aucune idée du grand fait massif, énorme, décisif, qui est l’entrée en masse des païens dans l’économie de la nouvelle Alliance“. L’auteur du livre “Le Christ hébreu” voit là l’un des nombreux arguments prouvant une écriture des évangiles très tôt après la résurrection de Jésus.

Outre le sens littéral et historique, la Bible renferme un sens spirituel, lié à différentes strates de l’histoire avec le même enseignement prophétique se répétant. En fait ce signe de Jonas, est actuellement donné de nouveau à nos sociétés occidentales apostates mais, dans leur aveuglement, elles ne le perçoivent pas. Il s’agit du début de cette amplification imprévue des conversions des musulmans au christianisme, comme ceci l’a été pour la conversion des païens du bassin méditerranéen à partir du 1er siècle. A vue humaine, l’Europe semble s’acheminer vers une majorité musulmane, estimée par certains à un horizon d’une quarantaine à une cinquantaine d’années, via une forte démographie et une forte immigration. Un tel “pronostic” ne tient pas compte du fait que les apostats européens seront progressivement remplacés par de nouveaux convertis, vrais disciples de Jésus, selon ce qu’Il dit : “quiconque d’entre vous ne renonce pas à tout ce qu’il possède, ne peut être mon disciple” (Luc XIV-33). En effet, avec leur conversion, ce à quoi ces convertis renoncent est énorme : leur passé, leur famille, leurs amis, leur communauté, une sécurité physique, i.e. à ce qu’une grande majorité des chrétiens européens de souche n’est pas prête de faire. Ces néo-chrétiens ont la foi et le courage des premiers chrétiens, comme le montre le témoignage de Mohammed-Christophe (TEXTE), (VOIR AUSSI). Quant à “Des hommes de Ninive se lèveront au jugement avec cette génération et la condamneront“, les nombreux témoignages de convertis au risque de leur vie, leurs articles sur de nombreux sites, dont le notre, sont déjà implicitement une condamnation. A nous “chrétiens de souche“, ces convertis nous communiquent l’Espérance, vertu théologale qui permet, à leur sujet, de reprendre la conclusion d’un texte publié par Notre-Dame de Kabylie (CF. l’article):

C’est toujours avec les moyens les plus faibles, insignifiants aux yeux du Monde (au sens johannique), que le Seigneur manifeste Sa Toute-puissance. Il y a deux mille ans les disciples de Jésus en ont été le premier exemple. Ils étaient le “sel de la terre”, ce petit peu, cette infime pincée, qui a donné ensuite du goût, de la saveur au tout, c’est-à-dire à toute l’humanité“.

– [*] “Trente jours dans le monde et dans l’Église” était un mensuel édité en italien, français, anglais, allemand, espagnol, et portugais. Sa publication a cessé en juin 2012.

– [**] Le philosophe exégète Claude Tresmontant (décédé en 1997) [LIRE], est reconnu internationalement comme un spécialiste du prophétisme hébreux. Membre correspondant de l’Institut, il a enseigné la philosophie des sciences à la Sorbonne, et a publié une quarantaine d’ouvrages. Guy Sorman l’avait retenu au nombre des vingt penseurs contemporains qui comptaient vraiment. A sa disparition Pierre Chaunu (membre de l’Institut) a fait son éloge. Le grand rabbin Jacob Kaplan disait de lui “Ce Juste parmi les nations est l’homme au monde qui sait l’hébreu, nous, nous savons de l’hébreu” (rubrique “Lettres” du Figaro du samedi, dimanche 20 avril 1997).